[ Retour à la page précédente ]
La police ne communique plus sur les incendies de quatre-roues - par ordre du juge d'instruction Leonardo Malfanti, en charge du délicat dossier –, mais les voitures, elles, continuent de brûler.
Dans la nuit de samedi à dimanche, peu après 2 h du matin, un coup de téléphone parvient à la caserne des pompiers annonçant un fort dégagement de fumée dans le parking souterrain de la Coop de la Jonction, situé à l'intersection du boulevard Carl-Vogt et de la rue du Vélodrome. L'opérateur du SIS lance la grande alarme: cinq véhicules et une quinzaine d'hommes se rendent immédiatement sur les lieux.
Plafond fissuré
Des lieux qui ressemblent, dans leur configuration, à ceux de Châtelaine où un départ de feu similaire s'est produit à mi-septembre. Il faut à nouveau attaquer le sinistre en s'équipant d'appareils respiratoires, puis en forçant la porte automatique qui ferme l'entrée au pied de la rampe d'accès. Juste derrière, une voiture de type Peugeot 206 achève de se consumer. Sous l'effet de la chaleur, le plafond se fissure, découvrant la ferraille prise dans la chape de béton.
Mais le plus dommageable est ailleurs, car la fumée - âcre, poisseuse, corrosive - n'a pas attendu que le feu soit rapidement maîtrisé pour s'insinuer partout. Et l'espace à polluer est vaste et lui aussi traversant.
Deux cents mètres de couloir, large comme une route à ciel ouvert, relient le périmètre réservé aux clients du magasin à la sortie débouchant sur la rue des Deux-Ponts. Il est jalonné de camionnettes de livraison. Et pour cause: une demi-douzaine d'artisans - menuisiers, vitriers, peintres en bâtiment - occupent cet entresol à l'ancienne propriété de la Ville de Genève. Aux premières loges, le garagiste Jean-Pierre Nicollier: «Quand je suis arrivé le lendemain, je n'ai pas reconnu mon lieu de travail en ouvrant la porte. Il baignait dans un brouillard stagnant et noirâtre», raconte-t-il.
C'est que les ventilateurs du SIS ont paré au plus pressé, sans se donner le temps - où l'auraient-ils pris d'ailleurs? - de désencombrer tous les recoins de ce labyrinthe industrieux. La visite des sanitaires confirme l'étendue des «dégâts collatéraux». «Nos toilettes sont impraticables», lance le serrurier John Rochat, en désignant la bouche d'aération par laquelle s'est introduit ce drôle de désodorisant. «Encore heureux que les pompiers soient intervenus vite et bien car nous sommes plusieurs à utiliser des matières inflammables», poursuit-il, sans connaître les causes réelles de l'incendie. Personne ne sait rien dans le quartier - même le concierge de l'immeuble n'a pas été informé - mais tout le monde penche pour un acte de vandalisme.
Le défilé des assureurs
«Il est facile de s'introduire ici, de jour comme de nuit. Certaines portes restent parfois ouvertes le week-end», note l'employé de l'entreprise de peinture, Juan-Carlos Barreiro, plaignant par avance les collègues qui, après-demain, seront chargés de redonner une couleur plus accueillante aux murs souterrains du parking. Pour l'heure, l'espace sinistré accueille le défilé des assureurs. Ils ont la mine des mauvais jours qui se répètent et savent, par expérience, que ce genre de dossiers sont difficiles à traiter.
La police aussi le sait, qui s'est empressée d'évacuer la carcasse de la Peugeot dans un endroit tenu secret. Avant le lever du jour dimanche matin, elle rejoignait le parc de véhicules incendiés dont la liste continue ainsi à s'allonger.
De quoi entretenir l'inquiétude des habitants de la Jonction, un quartier qui à lui seul - il s'en passerait bien - alimente le mystère depuis le 10 septembre dernier.
Thierry Mertenat - TDG
Genève : Une nouvelle voiture flambe à la Jonction
Les commentaires anonymes ne sont pas autorisés, veuillez vous enregistrer
Les commentaires sont la propriété de leurs auteurs. Nous ne sommes pas responsables de leurs contenus !