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Pimpon, pimpon : Toutes les sirènes à l'unisson

Proposé par : admin Le 23/02/2008 à 18:40

SuissePolice, pompiers et ambulances pratiquent le «deux tons alternés». Berne veille aux écarts. Si certains services sonnent différemment à l'oreille, c'est qu'ils n'ont pas le même fabricant.




LAURENT GUIRAUD | Caserne principale du SIS. Un générateur de sons alimente les trompes, orientées face à la route. Les sirènes sont toujours diffusées à l’avant du véhicule.

D'abord tordre le cou à cette idée reçue acoustique: tous les véhicules d'urgence qui sillonnent la ville sont équipés de la même sirène. Dans le langage administratif du Service des automobiles, on appelle ça un «avertisseur à deux tons alternés». Ces deux tons-là (l'équivalent du sol dièse ré dièse au piano) sont les plus surveillés de Suisse. Berne a l'oreille fine et sanctionne, via son Département fédéral des transports et de l'environnement, tous les écarts mélodiques.

Les directives tiennent en effet sur plusieurs pages et ne se lisent pas comme un manuel de composition musicale. «Lorsque l'avertisseur est installé, l'intensité de chaque son ne doit pas excéder 115 décibels. La durée d'un cycle complet (deux sons aigus, plus deux sons graves) doit être de 2,5 à 3,5 secondes.» Pas question de déroger à cette séquence rythmique ou de chercher à superposer les sons. Il y a dix ans, à Zurich, on a bien tenté d'introduire les sirènes américaines sur certains engins prioritaires. Vite éteintes par les dispositions fédérales.

A Genève, donc, on respecte la loi. «Tous nos camions de pompiers font le même bruit», assure le lieutenant David Comin, officier auto à la caserne du SIS. Et cette corne de brume pour naufragés, qui retentit aux carrefours, c'est quoi? «Le klaxon, simplement», actionné par le chauffeur pour marquer davantage sa présence.

Le mélomane de rue insiste: «Les ambulances s'entendent différemment à leur passage», assure-t-il. Une distinction confirmée par le photographe Eric Aldag, l'oeil du fait divers. «Mon oreille ne m'a jamais trahi. Je sais par avance ce qui passe sous mes fenêtres. Le cardiomobile ne sonne pas comme la grande échelle.»

Griffe acoustique
Vrai. Ces nuances qui alimentent la discussion, on les doit aux fabricants de sirènes. L'électricien du garage de la police genevoise est incollable sur la question. «Chaque marque a sa tonalité, explique-t-il, sa griffe acoustique si l'on veut bien, dans le respect du cahier des charges. Ainsi le fournisseur hispano-américain de la gendarmerie diffère légèrement de celui, allemand, équipant la BMW jaune du cardio. Ce dernier produit un son alterné plus proche du bruit de synthèse.»

Fausses alarmes
Voilà pour le débat entre -musicologues urgentistes. Le citoyen habitant le long de l'avenue du Mail, l'une des artères les plus exposées au passage quotidien des sirènes et feux bleus, se dit parfois qu'il habite à New York.

«Le grief principal des riverains concerne l'utilisation des avertisseurs la nuit, résume le commandant du SIS, Raymond Wicky. Les gens n'ont pas conscience de la législation et de la responsabilité individuelle du collaborateur. S'il n'a que ses feux allumés, il perd sa priorité. Un pompier comme un policier ou un ambulancier n'est prioritaire que s'il a les deux signaux, visuel et acoustique, branchés. Enfin, il faut compter avec un bon millier de fausses alarmes par année. Chacune nécessite un engagement en urgence.»

Modèles vibratoires pour malentendants
Au royaume des sirènes, on n’arrête pas le progrès, à défaut de laisser dormir les gens. Jusqu’à la fin des années 80, on utilise un compresseur pneumatique équipé d’un moteur de 12 volts. Le son est fort, net, franc, mais la mécanique s’use vite. Les fabricants passent alors à l’électronique. Un générateur et deux trompes (basso, alto). Les problèmes d’entretien sont résolus; il n’y a plus de pièces en mouvement. Le son, lui, perd en puissance. Selon les obstacles devant le véhicule et la réflexion à l’arrière, il paraît parfois un peu étouffé. D’autant que les tests de décibels se font en laboratoire, pas en situation réelle. Dernièrement, un fournisseur scandinave a inventé un système d’alarmes vibrantes, destinées à être identifiées par les malentendants, mais aussi à s’imposer dans des environnements urbains à forte concurrence sonore. Un système qui équipe quelques véhicules de la Brigade autoroutière ainsi que des voitures banalisées d’intervention rapide.

Rien à voir avec le son oscillant, lancinant et pour tout dire cinématographique des sirènes américaines. Un son qui continue à en faire rêver plus d’un. «Je vis à New York depuis deux ans. A l’oreille, cette ville est en état d’alarme permanente. Après une semaine de sports d’hiver dans les Alpes valaisannes, j’ai hâte de la retrouver. Mes tympans commencent à déprimer», avoue cet écrivain genevois qui court dans Central Park. (thm) 

Source : Tribune de Genève - THIERRY MERTENAT

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